L’histoire de ce fort commence à la fin du XVIème siècle dans le cadre des guerres frontalières entre les Dauphins d’un côté, et les Savoyards alliés aux Piémontais et aux Espagnols de l ‘autre.

En fait la premier fort est l’œuvre d’un architecte italien Ercole Negro qui a conçu ce système de fortification bastionnée, très efficace pour se protéger des tirs d’artillerie. C’est en 1598 que le duc de Lesdiguières, fidèle serviteur d’Henri IV, réussit à prendre ce fort aux Savoyards, aménage ce type de construction pour la rendre plus performante et y installe des troupes.

Un siècle et demi plus tard, sous le règne de Louis XIV, le maitre en architecture militaire est incontestablement Vauban. Infatigable, travailleur et excellent tacticien il met tout son savoir faire au service du roi et construira, ou aménagera environ 150 forts sur tout le territoire français.

Il redessine le fort selon un de ses principes qui consiste à rendre la vie très difficile aux assaillants : «  il faut multiplier les obstacles pour les ralentir. » Ainsi en est-il des ponts, fossés, portes et herses. Toute une vie s’organise avec 2400 hommes stationnés dans trois casernes, et différents corps de bâtiments utiles à la vie militaire : arsenal, hôtel du gouvernement, chapelle, puits, etc…

Au fil de sa vie et de ses déplacements Vauban écrit: on retrouve son avis et ses témoignages dans un recueil de textes intitulé « Les Oisivetés de M.Vauban, ou ramas de plusieurs mémoires sur différents sujets ». Cette lecture révèle une autre facette de notre architecte stratège, celle d’un observateur éclairé et critique qui fait de lui un précurseur du siècle des Lumières.

Le temps passe, notre guide évoque rapidement les travaux entrepris par le général Haxo au XIXème siècle, pour se protéger des Autrichiens qui arrivaient de Grenoble. Le fort accueille aussi des prisonniers, des communards, puis des Allemands en 14/18 .
Mais le comble de l’horreur évoqué par notre guide ce sont les années noires de la deuxième guerre, pendant lesquels furent écroués droits communs, étrangers, communistes , juifs, syndicalistes, résistants , qui vécurent là dans des conditions de détention absolument ignobles .

Les compromis et compromissions avec les civils, notamment les gens du village de Barraux, constituent des pages noires de notre histoire dont notre guide témoigne.

A l’issue des deux heures de cette plongée historique, nous retrouvons, à l’extérieur, l’immense beauté de la vue sur Belledonne, bouleversées par ce contraste entre les horreurs dont l’homme est capable, l’harmonie de ces constructions et la sérénité du site, par cette magnifique journée estivale, convaincues par l’importance de connaitre toutes les faces de notre histoire, même les plus sombres.

L.B 15/06/2023