LA MAISON SAINT-YVES : UNE MERVEILLE DE L’ART DECO
LA MAISON SAINT-YVES : UNE MERVEILLE DE L’ART DECO

Ce remarquable bâtiment, dans lequel d’éminents artistes bretons ont entremêlé les tendances Art Déco et le renouveau artistique breton, est un enchantement continu du cloître à la chapelle en passant par la crypte et la bibliothèque.
Construite entre 1925 et 1927 par l’architecte Georges-Robert Lefort, à l’initiative de l’évêque Monseigneur Serrand, la chapelle de la maison Saint-Yves, joyau de l’art déco et du mouvement Seiz Breur (les 7 frères) faisait partie de l’ancien grand séminaire qui a formé 700 prêtres jusqu’en 1970.
Les bâtiments seront réhabilités par Monseigneur Moutel qui entreprendra des travaux de 2015 à 2017 pour en faire la maison diocésaine.
Nous commençons notre visite guidée par le cloitre : le béton confère un aspect épuré et moderne jusqu’au clocher. En son centre, un jardin paysager structuré en 12 espaces (référence aux 12 apôtres) , de l’eau, des bancs blancs en opposition aux bancs noirs de l’esplanade (référence au drapeau breton), sculptures d’Isabelle Blanchard (artiste de Plérin).



Nous poursuivons par l’ancien hall d’entrée du séminaire, jolie mosaïque au sol, puis la crypte, oratoire créé en 1949 pour recueillir les restes de Monseigneur Serrand : autel en bois de chêne et bois du Benin, fresques de Xavier de Langlais, représentant le péché originel et la présentation de Marie au temple, vitraux aux trois couleurs : bleu (le baptême), jaune (la confirmation), rouge (la communion).

Nous entrons dans la chapelle. La lumière filtre à travers les vitraux. La chapelle Saint-Yves est unique. Dès le narthex, réalisé par Edouard Chain apparaissent les mosaïques d’Odorico, italien dont l’œuvre est présente à Rennes et a fait l’objet d’une visite précédente. Les autels, le sol, sont composés de ces milliers de mosaïques colorées, dorées, ou en duo de noir et blanc, rappel au Gwen Ha Du, drapeau de la Bretagne. Il est bienvenu de s’asseoir sur les bancs de bois, dans lesquels sont sculptés des artichauts pour admirer les fresques. On note une représentation abstraite : pas de figures humaines ici, évoquées cependant par les attributs des apôtres dans le chœur. La visite se termine par un passage à la bibliothèque qui protège des ouvrages anciens et bien sûr le traditionnel goûter.
Gisèle Thiry et Josette Salmon


DU STREET-ART… AU MUSÉE DE LA MARINE À BREST
DU STREET-ART… AU MUSÉE DE LA MARINE À BREST

Deux univers totalement différent pour cette sortie qui nous a permis de découvrir les œuvres de Ernest Pignon-Ernest avant de nous plonger dans l’histoire de la marine à Brest, de la vapeur au nucléaire.
La matinée commence à la Fondation Edouard Leclerc à Landernau pour une exposition consacrée à Ernest Pigon-Ernest, né en 1942, considéré comme le un précurseur du street art en France.
Ses dessins, réalisés au fusain ou à la pierre noire, sont reproduits en sérigraphies, imprimés sur du papier journal, puis collés sur les murs des villes à des endroits et à des moments précis.
Ces figures humaines semblent naître des murs eux-mêmes, évoquant l’histoire passée des lieux.
Ces images, forcément éphémères, vouées à disparaître avec le temps, exaltent la mémoire enfouie, les événements ou les mythes.



L’artiste, alerté par l’état du monde, profondément engagé, nous entraine dans l’émotion parfois violente qu’il ressent. Par exemple :
- Ecce homo et Yoyo: l’artiste réinscrit par l’image le souvenir des prisonniers à Lyon, incarcérés, torturés, exécutés
- Souvenir de la semaine sanglante de la Commune.
- Rimbaud: la multiplicité des collages permettait d’évoquer un Rimbaud différent, pluriel, éphémère, errant (en position de fugue, habillé de façon actuelle, imaginé âgé).
- Naples: lors de sa quête religieuse Ernest Pignon-Ernest effectue un parcours autour de la mort avec étude des cultes païens et chrétiens et autour des femmes (Médusa, Sainte Véronique)


- Les cabines téléphoniques: théâtres de drames du quotidien.
- La mort de Pasolini: pietà où Pasolini porte son propre cadavre.
- Pablo Neruda: sérigraphies effectuées au Chili, collées dans les rues malgré le danger.
- La grande toile sur Victor Ségalen(1878- 1919): médecin de la marine, sinologue, archéologue et poète, écrivain du mystère.
Après un déjeuner (se concluant par la dégustation de délicieux cèpes sucrés) pris face à la marina de Brest, direction le Musée de la Marine.
Introduction avec l’histoire du château: Castellum romain, son origine remonterait au III°siècle après.J.-C. Équipé de murs, tours avec toits et donjon, il abritait au XIII°siècle les habitants du village et est vendu au duc de Bretagne en 1235, puis aux Anglais en 1350. Occupé successivement par les Bretons, les Anglais et les Français, il est l’objet d’importants travaux. Jean V puis François II le dotent de deux grosses tours, d’un pont-levis et d’artillerie. En 1505, la reine Anne de Bretagne séjourne dans le château. A la fin du XVI°siècle, les Protestants et les Espagnols attaquent Brest, sans succès. En 1631, le cardinal de Richelieu décide d’installer un arsenal à Brest. Vauban intervient entre 1683 et 1695; il effectue des travaux dans la rade et une terrasse sur le donjon pour y aménager les canons. Pendant la révolution française, le château sert de prison et la tour Paradis ainsi nommée parce située devant la guillotine. Le château est classé Monument Historique au XIX°siècle. Pendant la 2° guerre mondiale, le château est occupé par les Allemands et sert de prison pour les Résistants. De nombreux tunnels ont été construits.
Profitant du beau temps, nous admirons la vue sur la rivière avec le pont levant de Recouvrance et le nouveau téléphérique qui relie les Ateliers des Capucins à la rue de Siam. Puis, de l’autre côté du Château, la rade de Brest avec l’arrivée d’un sous-marin !



Nous pénétrons ensuite dans la tour Paradis. Un tableau nous rappelle la visite de Napoléon III et de l’Impératrice Eugénie à Brest à bord du Canot de l’Empereur. Puis, nous découvrons le premier pont tournant de Recouvrance(1861). Pour, ensuite, comparer les différents navires construits à Brest à cette époque. En particulier, le Laperouse, navire mixte, qui associait la voile et la vapeur, suite à l’invention de la vapeur, de la protection de coque par cuivre doublé d’acier et de l’hélice. Les grues de chantier naval ont été hydrauliques puis électriques. Pendant la 1°guerre mondiale, Brest a joué un rôle important en accueillant un grand nombre d’Américains et de marchandises, événement commémoré par l’édification de la colonne Dajot.
C’est lors de la Libération, à la fin de la II° guerre mondiale, que la ville de Brest a été bombardée par les Américains. Miraculeusement, le Château a été épargné. 40 000 otages allemands ont été pris. Pour reloger en urgence la population, des baraquements ont été construits dans la ville , sur les gravats, rehaussant ainsi le niveau du sol. Puis, nous avons détaillé des pièces de la « Jeanne »(1931-1964), bateau mythique. C’était un porte hélicoptère qui servait de bateau école. Partant pour des voyages de 7 mois, il a fait 79 fois le tour de la terre et a participé à de nombreuses actions d’aide humanitaire. Enfin, se présentent des maquettes de sous-marins nucléaires, avec ou sans missiles. Actuellement au nombre de 4, ils sont basés à l’île Grande de l’autre côté de la rade de Brest.
Dominique Brillant
ARMANDE BEJARD, MADEMOISELLE MOLIERE
ARMANDE BEJARD, MADEMOISELLE MOLIERE

Une conférence théâtrale de Michelle Brieuc, ponctuée d’extraits de rôles d’Armande, a permis de prendre conscience de l’importance de cette comédienne du Grand siècle à la fois muse, égérie et femme de Molière pendant 11 ans !


Dès sa naissance, le 3 juillet 1638, la filiation d’Armande Béjart intrigue. D’aucuns disent qu’elle est la fille de Madeleine qui fut la maîtresse de Molière qui donc pourrait être son père. En fait, Madeleine était la maîtresse de Monsieur de Modène, gentilhomme d’Avignon, qui, après moult promesses, n’a pas reconnu l’enfant. À 20 ans, Madeleine se retrouve mère célibataire. Officiellement, les parents de Madeleine Béjart, Joseph Béjart et Marie Hervé, reconnaissent être les parents de cette petite fille nommée Armande. Légalement tout est en ordre mais l’identité exacte d’Armande suscite encore de nombreuses polémiques.
Armande grandit en Languedoc, loin du monde théâtral des Béjart que Jean-Baptiste Poquelin a rejoint et avec qui il crée l’Illustre Théâtre. Au sein de cette troupe, le 28 juin 1644 il devient Molière, sans jamais révéler le secret de son pseudonyme.
Quand elle retrouve sa famille Béjart, Armande intègre la troupe sous le nom de Mlle Menou, et joue le rôle de la néréide Éphyre, un rôle de figuration qui ne compte que 4 vers. Dès l’Automne 1658, Armande partage la vie des comédiens et son nom apparaît pour la 1ère fois dans la troupe, le 26 août 1659. Pour tous, elle est la sœur cadette de Madeleine.
Molière, à près de 40 ans. Homme sérieux et rigoureux, organisé mais peu expansif, il est las des amours banales, tandis que la fortune et le succès commencent à lui sourire. Depuis 10 ans, il côtoie la jeune Armande. En séducteur invétéré, il l’amuse, il la charme et tombe amoureux d’elle. Après 3 ans d’une relation amoureuse tenue secrète, Molière fait part à troupe de son désir d’épouser Armande.


Le mariage discret, loin du faste auquel on aurait pu s’attendre d’un jeune couple amoureux, proche de la cour, est célébré à Saint-Germain-l’Auxerrois, le 20 février 1662. Il fait couler beaucoup d'encre car l’union de 2 comédiens dans une église choque et les détracteurs mettent en avant les supposés liens entre Armande et Molière. De surcroît Molière a 20 ans de plus qu’Armande ! Pour faire taire les ragots qui circulent sur son mariage, Molière se serait rendu devant Louis XIV pour lui présenter l’acte de baptême d’Armande et lui prouver qu’ils n’étaient pas liés par le sang.
Armande, jeune femme coquette, se laisse courtiser par une foule d'admirateurs. Elle aime les belles parures et les vêtements délicats et elle a le charme un peu provocant lié à la liberté des mœurs et de l’esprit de cette époque. Ce qui rend Molière fort jaloux. Les rieurs se moquent de lui car il met en scène des personnages de mari trompé : Si vous voulez savoir pourquoi presque dans toutes ses pièces il raille tant les cocus et dépeint si naturellement les jaloux, c'est qu'il est du nombre de ces derniers.
Madeleine Béjart qui subit le châtiment inexorable du vieillissement, change « d’emploi » et s’éclipse devant le talent naissant de sa fille. Armande devient la jeune 1ère pour qui Molière écrit et, le 9 juin 1662, elle apparaît pour la 1ère fois sous le nom de Mademoiselle Molière. Très vite, elle obtient des succès éclatants dans les rôles de femmes coquettes et satiriques, d’ingénues qui s’accordent avec sa nature. Elle est véritablement l’inspiratrice et la créatrice de toutes les héroïnes de Molière et suscite la jalousie des comédiennes qui disent qu’il écrit ces rôles pour elle et ne travaille que pour ses talents.



Le couple aura 4 enfants : Louis, Esprit-Madeleine, Marie et Pierre-Jean-Baptiste-Armand. Seule, leur fille Madeleine-Esprit survit.
17 février 1673, lors de la 4ème représentation du Malade imaginaire, Molière est pris d’une quinte de toux sur scène et les efforts qu'il fait pour jouer lui sont funestes. Suite à une convulsion, il est ramené chez lui, rue de Richelieu où il expire quelques heures plus tard, d’une congestion pulmonaire. Son agonie, qui a débuté sur la scène, donne à sa mort un caractère héroïque.
Le curé janséniste de Saint-Eustache lui refuse une sépulture chrétienne, au motif qu'il est mort sans avoir reçu les derniers sacrements. Armande se bat pour qu’il soit inhumé dans des conditions décentes et chrétiennes. L'inhumation a lieu le 21 février au cimetière Saint-Joseph, situé dans l'actuel 2ème arrondissement de Paris. Le soir des funérailles, la foule se rassemble devant la maison mortuaire pour honorer Molière qui l’a beaucoup amusée. Armande demande au peuple de donner des prières à son mari. Par la suite, toutes les paroisses de la ville ont donné plusieurs messes en l’honneur de Molière.
Après la mort de Molière, Armande veille à l’avenir de la troupe et s’emploie à maintenir l’œuvre de son mari.
En mars 1676, elle acquiert à Meudon, une grande maison qui, au milieu du 16ème siècle, était celle d'Ambroise Paré. Elle abrite aujourd'hui le Musée d'art et d'histoire de la ville.
Le 31 mai 1677, Armande épouse Isaac-François Guérin d'Estriché, issu d’une famille de comédiens, qui a quelques années de plus qu'elle. Honnête homme, estimé dans son art, il a rejoint la troupe de l'Hôtel Guénégaud en 1673.
Les frères Parfaict, historiens du théâtre français, notent : Ces époux vécurent dans une grande union. Elle avait un mari d'esprit, qu'elle aimait peu. Elle en prend un de chair, qu'elle aime davantage.
Ce 2ème mariage choque les fervents Moliéristes. Comme si elle avait commis un crime, ou un sacrilège ! Encore jeune et belle, Armande n’a pas été heureuse dans son 1er mariage, elle le sera dans le second. En1678, elle donne naissance à un fils, Nicolas-Armand-Martial.
21 octobre 1680 la Comédie-Française est fondée par ordonnance royale de Louis XIV et Mademoiselle Guérin (ex Melle Molière) est l'une des 1ères sociétaires.
À 52 ans elle se retire du théâtre et s’attache de plus en plus à son intérieur où elle vit très retirée et décède le 30 novembre 1700 à Paris, à 58 ans. Son acte de décès, ne fait aucune mention de Molière, dont elle ne porte plus le nom. Néanmoins, pour la postérité, en dépit de Guérin, elle est la veuve de Molière, celle qui a vécu 11 ans près de lui, l’interprète et l’inspiratrice de ses chefs-d’œuvre. Son enterrement a lieu au cimetière de l'église Saint-Sulpice, en présence de Nicolas Guérin, son fils, mais en l'absence de sa fille.
Après l'inventaire clos le 21 janvier 1701, la succession est partagée le 29 novembre 1703 entre Isaac Guérin d'Estriché, Nicolas Guérin et Esprit-Madeleine Poquelin, lesquels vendront la maison de Meudon en 1705.
Unie trop jeune à un mari trop âgé à la sensibilité très vive, Armande, femme très séduisante, mais surtout coquette, avide de plaisirs et de vie bruyante, aimait plus les manèges de l’amour qu’ils procurent que l’amour lui-même. Molière n’a pas trouvé auprès d’elle une vie de famille, intime et cachée à laquelle il aspirait. Jaloux, mais sans croire à l’infidélité de sa femme, il aurait été malheureux de n’être pas aimé.
Molière a écrit pour elle de nombreux rôles dans lesquels elle a excellé. Son talent, tant dans le tragique que dans le comique, a été reconnu de tous ses contemporains. Une fois veuve, elle a compris la perte qu’elle a subie et ce qu’elle devait au grand nom de Molière. Elle s’est efforcée de réparer son erreur en portant dignement le deuil de son mari. Elle a contribué grandement à empêcher la ruine du théâtre qu’il avait fondé en assurant le respect de sa mémoire.
Michelle Brieuc
MARCEL PROUST : DE COMBRAY A BALBEC, DESTINS CROISES
MARCEL PROUST : DE COMBRAY A BALBEC, DESTINS CROISES

A l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance, Michelle Brieuc a évoqué ce grand écrivain par Zoom avec de nombreux clubs. Marcel Proust a été le mondain dilettante et fortuné, fréquentant les salons de la bourgeoisie et de l’aristocratie et l’écrivain retiré dans sa chambre, s’épuisant au travail, porté par un projet fou, celui de La Recherche : 3 000 pages en 7 titres pour entrelacer les destins de plus de 200 personnages. Considéré comme le précurseur du roman moderne, il se révèle à travers les personnages qui peuplent sa composition littéraire
Ses parents
Valentin Louis Georges Eugène Marcel Proust est né à Paris, le 10 juillet 1871. Son père, Adrien, est issu de la petite bourgeoisie catholique provinciale. Chef de clinique puis Professeur en médecine, il connaîtra une grande notoriété dans le milieu médical.
Sa mère, Jeanne Weil, est la fille d’un riche agent de change d’origine juive alsacienne. Issue de la bonne société parisienne, elle parle plusieurs langues, aime la musique et la peinture. À 21 ans, elle rencontre Adrien Proust qui a 15 ans de plus qu’elle. Lors des journées dramatiques de la Commune, Adrien Proust est légèrement blessé par une balle perdue en allant prendre son service à l’hôpital de la Charité. Sa femme, enceinte de Marcel, se remet difficilement de l’émotion éprouvée à cette occasion


Valentin Louis Georges Eugène Marcel Proust naît à Auteuil dans la maison de son grand-oncle maternel, Louis Weil. Il est si faible que son père craint qu’il ne soit viable. Très tôt, Marcel concentre son amour sur sa mère et considère son frère cadet, Robert, né en 1873, comme un rival à évincer pour rester l’unique bénéficiaire de l’amour maternel. Les rapports entre les deux frères ne seront jamais intimes. Marcel l’a gommé dans La Recherche.
A 9 ans, lors d’une promenade au Bois de Boulogne, Marcel est victime d’une crise d’asthme extrêmement violente. L’asthme chronique contraint le jeune garçon à de fréquents repos. Il a tendance à se replier sur lui-même, développant des tendances à l’introspection.
Chaque année, les Proust rejoignent Illiers où se trouve la maison de Mme Amiot, la sœur aînée du Docteur Proust. Neurasthénique, elle vit recluse dans sa chambre, calfeutrée sous un édredon. Sous la plume de Marcel, cette maison familiale devient celle de tante Léonie.
Chaque soir, au coucher, Marcel attend le baiser de sa mère autant qu’il le craint. Déjà le bonheur le préoccupe : pourquoi il s’en va si vite ? Comment le rattraper, comment le retrouver et le garder ? Un jour d'hiver, sa mère lui prépare du thé et des madeleines. Machinalement, Marcel trempe la madeleine dans son thé et à chaque fois tous ses souvenirs refont surface. D'où l'expression La madeleine de Proust.
Après le décès de sa tante Elisabeth, Marcel ne reverra Illiers qu’au cours de rares visites. L’enchantement de l’enfance est rompu, sa mémoire prendra le relais. Le village sera rebaptisé Illiers-Combray en 1971, lors du centenaire de la naissance de Marcel Proust.
À Paris il rencontre Marie de Benardaky avec qui il ressent les 1ers élans pour aimer ou se faire aimer par quelqu'un d'autre que sa mère, mais il échoue. 1887-1888, ses 1ères attirances pour les garçons apparaissent, mais jamais il ne reconnaîtra ouvertement la vraie nature de ses penchants.
15 novembre 1889 Proust devance l'appel pour 1 an de service militaire jusque 1890 à Orléans. Il en garde un souvenir heureux.
Septembre-octobre 1891, avec sa grand-mère et sa mère, il est à Cabourg et Trouville, qui vont inspirer ses écrits. Après l’obtention de sa licence en droit, il refuse de faire carrière dans la diplomatie ou la magistrature et annonce à son père : Toute autre chose que je ferai, autre que les lettres et la philosophie, est pour moi du temps perdu. En 1896 il publie Les Plaisirs et les Jours, un recueil de poèmes en prose, portraits et nouvelles dans un style fin de siècle, illustré par Madeleine Lemaire, peintre, illustratrice.
Jean Lorrain, réputé pour la férocité de ses critiques sous le nom de Raitif de la Bretonne, qualifie Proust de chochotte et d’écrivain précieux et surtout il révèle sa liaison avec Daudet. L’article fait scandale. Marcel Proust provoque Lorrain en duel dans le bois de Meudon. 6 février 1897 le duel se fait au pistolet, deux balles sont échangées sans blessure. Toute sa vie, l’écrivain sera fier de ce fait d’armes. Dilettante, doté d’une réputation de snobisme, il poursuit son ascension mondaine dans les salons parisiens et déclare en 1901 : J’ai aujourd’hui 30 ans et je n’ai rien fait !


Son père meurt le 26 novembre 1903 et sa mère le 26 septembre 1905 : Elle emporte ma vie avec elle. Ce drame terrible aggrave son remord de n’avoir pas été pour elle le fils qu’elle aurait souhaité et de ne pas lui avoir rendu l’amour qu’elle lui prodiguait.
Après Illiers, résidence de son enfance, il découvre Cabourg. Ayant appris qu'il y avait un hôtel confortable, il y résidera sept étés de suite entre 1907 et 1914. 1907 est l'année où, dans la chambre 414 du Grand Hôtel, il commence l'écriture d'une suite de romans formant une vaste comédie humaine de plus de 200 personnages: «A la recherche du temps perdu » qui sera publiée entre 1913 et 1927.


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Cabourg a donné son nom à une promenade qui longe le bord de mer et s'étend sur près de 4 km depuis Franceville jusqu'à Cap Cabourg.
Proust vit de plus en plus reclus, accompagné de Céleste, sa seule confidente. Elle rédige sous sa dictée, rassemble et vérifie ses informations et l’assiste au quotidien. Elle est Françoise, dans la Recherche. Le 2 août 1914 l’édition de l’œuvre de Proust est suspendue, Bernard Grasset est parti au front. Craignant d’être mobilisé, Proust consulte les médecins qui le dispensent car sa piètre santé ne cesse de s'altérer.
De 1914 à 1918, au 2ème étage du 102 boulevard Haussmann, il travaille avec acharnement sur les corrections des 5000 pages d’épreuve de À l’ombre des Jeunes filles en fleurs. Avril 1918 une paralysie faciale et des troubles de la parole le clouent au lit.
1er octobre 1918 il aménage 44 rue Hamelin, dans un meublé au 5ème étage où il poursuit son œuvre. Il fréquente le Ritz, 2 ou 3 fois par semaine, son dernier écrin doré, jusqu’à sa mort.

2 auteurs sont en lice pour le Goncourt 1919. Roland Dorgelès chante les poilus dans Les Croix de bois, il a combattu plus de 2 ans comme engagé volontaire. La France pleure ses morts, impossible de célébrer À l’ombre des jeunes filles en fleurs, dont l’auteur est considéré comme un mondain qui a passé la guerre entre la chambre, le boudoir et la sieste. Mercredi 10 décembre 1919, 14 heures, Proust est élu !Son élection crée une émeute littéraire. La presse se déchaîne contre Proust jugé trop vieux (48 ans), trop riche (les 5.000 francs du Prix seraient plus utiles à un autre), trop mondain, homosexuel et planqué pour ne pas avoir fait la guerre. Les mauvaises langues parlent de proustitutions, elles accusent l’auteur d’avoir été un goncourtisan, de n’avoir écrit que des gallimardtias ou des petites coliques d’enfant.
16 heures : Gaston Gallimard et Léon Daudet frappent à la porte de Proust. Il dort. Épuisé, il refuse de voir les journalistes et reste emmitouflé dans ses couvertures.
Au cours de sa dernière sortie en octobre 1922, il prend froid et la grippe s’installe. Il refuse les soins de son médecin et de son frère Robert. Dans la nuit du 17 au 18 novembre, bien que très faible, il appelle Céleste pour l’aider à travailler : Si je passe cette nuit, je prouverai aux médecins que je suis plus fort qu’eux. Mais il faut la passer. Croyez-vous que j’y arriverai ? À 3 heures et demie du matin, à bout de force, il avoue : je suis trop fatigué, arrêtons Céleste, je n’en peux plus, mais restez là. L’après-midi du 18 novembre 1922 son frère Robert et son médecin décident de cesser les soins. Le vicaire de Sainte-Clotilde vient dire les prières des trépassés et place entre ses mains le chapelet qui sera son passeport pour l’éternité. 18 novembre 1922 à 4 heures et demi de l’après-midi Marcel Proust meurt en présence de son frère Robert et de Céleste. Ses funérailles ont lieu le 22 novembre, dans la chapelle Saint-Pierre-de-Chaillot, avec les honneurs militaires dus à un chevalier de la Légion d'honneur. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise à Paris, auprès de ses parents, accompagné par une assistance nombreuse qui salue l’écrivain.
Bien que Proust ait traité de l'homosexualité dans ses écrits, il ne reconnaîtra jamais ouvertement son homosexualité, dont sa mère ne sera pas dupe, un état qui était très mal accepté par la société de l’époque et, à plus forte raison, par le milieu bourgeois dont il est issu et qu’il fréquente.
Michelle Brieuc
A LA RECHERCHE DE MARCEL PROUST ET DE SON UNIVERS NORMAND !
Voyage du Lyceumclub de Bretagne-nord du 28 et 29 septembre 2022
A LA RECHERCHE DE MARCEL PROUST ET DE SON UNIVERS NORMAND !

De sa chambre au Grand Hôtel de Cabourg en passant par la Maison du Temps retrouvé pour une plongée dans la Belle Epoque, nous avons ensuite suivi les traces des 22 personnalités qui ont marqué la ville d’Honfleur jusqu’à la Ferme Saint-Siméon, berceau de l’impressionnisme.
Pour son grand roman, A la recherche du temps perdu, Marcel Proust utilise des lieux personnels dont Combray (Illiers) qui raconte sa petite enfance, ses émerveillements et ses premiers déchirements, et Balbec (Cabourg), qui témoignent de ses séjours à Cabourg.
Marcel Proust, dans son écriture romanesque fait de la ville de Cabourg, (qui devient Balbec), sa côte et ses paysages, le décor de son œuvre. La côte entre Trouville et Honfleur, qu’il découvre avec sa mère et sa grand-mère sur la grève, au pied des falaises des Vaches Noires, l’enchante. Adulte, il revient sur ces lieux qu’il fréquentera de 1907 jusqu’à 1914. Cabourg, station à la mode, participe à son inspiration romanesque.

Dès son arrivée à Cabourg, il s’installe au quatrième étage de ce grand Hôtel aux vastes salons et aux 200 chambres, entouré d'amis et de clients qu'il observe et décrira dans ses textes, parfois assez cruellement. Le temps de longs séjours estivaux, il façonne l’œuvre de sa vie, À la recherche du temps perdu. Il travaille toute la journée au fond de sa petite chambre puis il gagne la salle à manger. En novembre 1909, il fait lire les deux cents premières pages de la Recherche, et il prépare la grande démarche qu'il accomplira dès son retour à Paris : trouver un éditeur pour les deux volumes de la Recherche. Hélas, personne n’y répond favorablement ! Son travail dure treize ans et ne s'achève qu'à la veille de sa mort en novembre 1922.


Cette visite à Cabourg s’est poursuivie à la Villa du Temps retrouvé. Au cœur de sa ville, Cabourg propose de remonter le temps jusqu’à la Belle Époque grâce à la Villa du Temps retrouvé qui immerge le visiteur au tout début du XXe siècle. Exposées sur 600m2, les œuvres sont prêtées le temps d'une saison comme le manuscrit original d’À l'ombre des jeunes filles en fleurs.
UN DETOUR PAR HONFLEUR

« L’arrivée à Honfleur par la vieille route de Caen, entre les grands ormes, est très belle. Du reste il y a mille autres promenades » disait Marcel Proust…Le Jardin des personnalités, nous a séduit. Son espace de 10 hectares paysagers propose une promenade à la découverte des 22 acteurs du patrimoine historique et culturel de Honfleur qui ont marqué la ville, de Boudin à Satie en passant par Françoise Sagan et Michel Serrault.
…ET LA FERME SAINT-SIMÉON
Le lieu est célèbre pour avoir été au milieu du 19èm siècle le lieu de rencontre de nombreux peintres, pré-impressionnistes et impressionnistes.


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Eugène Boudin, le « Roi des ciels », né à Honfleur en 1824, a été à l'origine des séjours de peintres à Saint-Siméon. Il y loue une chambre chez la mère Toutain et il y entraîne ses amis, dont le peintre Millet.
1862, Claude Monet, alors âgé de 22 ans, et Jongkind accompagnent Eugène Boudin dans ses promenades sur la côte normande et découvrent la peinture en extérieur. Gustave Courbet appartient à cette colonie d'artistes qui trouvent le gîte et le couvert pour 40 francs par mois (Bazille, Isabey, Corot, Guillemet, Daubigny….).


Honfleur et son hostellerie de Saint-Siméon, furent durant près d’un ½ siècle le creuset où s’épanouit peu à peu ce que l’on peut nommer le pré-impressionnisme et l’Impressionnisme.
Boudin, Jongkind et Monet en ont été les phares. Le décor a changé, mais l’esprit de Saint-Siméon reste bien vivant en cette ville d’Honfleur.
Michelle Brieuc
FESTIVAL PHOTO A LA GACILLY
FESTIVAL PHOTO A LA GACILLY

L’édition 2022 du Festival photo de la Gacilly a mis en lumière des artistes d'Afganistan, d'Iran et du Pakistan. Foyer d'une civilisation millénaire et d'une créativité artistique, cette région du monde abrite des auteurs courageux d'un modernisme déroutant ayant choisi pour arme la photographie. Passage en revue.
FATIMA HOSSAINI
Quand les Talibans entrent à Kaboul, ils rétablissent la loi islamique et les premières victimes sont les femmes qui doivent à nouveau s'effacer derrière leur burqa et dont les libertés fondamentales sont bafouées. Les femmes qu'elle célèbre derrière l 'objectif sont à son image, elles sont belles, font preuve de courage , de dignité au cœur des pires épreuves. C'est le pari de cette exposition qui montre les multiples visages de cette beauté des différentes ethnies d'Afganistan. Patchtounes, Tadjiks , Hazaras , Ouzebeks ….Vêtues de leurs costumes traditionnels, enveloppées dans leurs soieries. De leurs traits, de leurs regards et de leur maintien jailli ce qui en elle incarne autant la féminité que l'espoir. Ici se conjugue la beauté et la paix et la paix est toujours belle.


SARAH CARON
Le 27 décembre 2007, Benazir BHUTTO est assassinée. Sarah Caron se trouve au cœur de l'une des périodes les plus tumultueuses de cette république islamique . Ses objectifs se posent là où son instinct de journaliste la guide. Elle présente ici des variations de ce Pakistan qu'elle a traversé d'est en ouest et du nord au sud de ces mégapoles vibrantes et fourmillantes jusqu'aux contreforts désertiques de l'Hindu Kush.
PAUL ALMASY
Photographe francais , il a eu la chance de visiter l'Afganistan au temps du règne du roi MOHAMMED ZAHER SHAH (1933 – 1973 ). Ce roi encourage la scolarisation et l'émancipation des femmes et fit adopter une constitution inspirée de la V° République. Sous son règne on cherche à s'ouvrir sur l'extérieur. Dans les années 1960, il découvre le Pakistan et rapporte des images qui aujourd'hui nous semblent irréelles, comme la photo d'une classe où une petite fille dévoilée est assise sur le même banc d'école près d'un petit garçon. Une scène bien éloignée des écoles coraniques. Les talibans ont rétabli les lois strictes de la charia qui renvoient la condition de la femme cent ans en arrière.



SHAH MARAI ET WAKIL KOHSAR
Shah Marai meurt en 2018 lors d'un attentat à Kaboul. Ses images sont pleine d'empathie pour son peuple, elles montrent le quotidien tranquille d'une population résiliente qui, malgré son éreintante histoire, parvient à vivre et à survivre au milieu de ce conflit. Wakil Kohsar a pris la relève de son ami et confrère et nous montre ici les photos de l'aéroport et des avions auxquels s'accrochent des silhouettes désespérées. Il montre également la tension des militaires américains.
ABBAS
Homme de peu de mots mais 1001 images . Célèbre pour son regard sur la révolution iranienne.
Il s'impose comme un perfectionniste de la lumière, capable de réunir à la fois la rigueur journalistique, l'excellence visuelle ainsi qu'une profonde et humaine intégrité morale. Il a mené une vaste enquête sur les religions et plus particulièrement sur les relations complexes qu'entretiennent les hommes avec leurs dieux.
Citons également VERONIQUE de VIGUERIE et GABRIELE CECCONI
Autre engagement du Festival photo: la préservation de la planète et la biodiversité.
Nous avons continué notre exposition par le LABYRINTHE VEGETAL

MELANIE WENGE nous emmène au cœur des iles australes : Kerguelen , Crozet, Saint Paul et Amsterdam . Elle a embarqué sur le bateau ravitailleur des iles australes le « Marion Dufresne : photos sur les éléphants de mer, les manchots , les otaries
BERNARD DESCHAMP. Photographe de la nature et des paysages il précise « j'appuie sur l'objectif quand je trouve : ça beau ». Son but c'est de provoquer l'émotion chez celui qui regarde ses photos.
Très belle journée hors du temps dans un cadre magnifique !
Christiane André
MATHURIN MEHEUT A L’OMBRE DU HARAS NATIONAL DE LAMBALLE
MATHURIN MEHEUT A L’OMBRE DU HARAS NATIONAL DE LAMBALLE

C’est dans un ancien bâtiment réhabilité du Haras national que le nouveau musée Mathurin Méheut a été aménagé pour mettre en valeur toutes les facettes de notre célébrité locale. La journée du 30 juin s’est donc déroulée autour de ces deux équipements implantés en plein cœur de ville.
Le musée Mathurin Méheut a abandonné la Maison du Bourreau, une belle Maison à pans de bois, pour s’étendre désormais dans un écrin moderne et fonctionnel car les collections s’étant enrichies et l’artiste ayant gagné en notoriété, les précédents espaces s’avéraient trop exigus ! Après une entrée où la biographie de l’artiste est déroulée, nous suivons un parcours qui propose aux visiteurs de découvrir son œuvre autour de trois grandes thématiques : la nature, la quotidien et l’ailleurs.
À la fois peintre, dessinateur, illustrateur, céramiste et décorateur, Mathurin Méheut (1882-1958) utilisa durant sa carrière des supports et techniques artistiques d’une très grande diversité. Doué d’un grand sens de l’observation et d’une curiosité sans limite, l’artiste est emblématique de la Bretagne, à laquelle il a consacré une œuvre documentaire prolifique, composée de paysages et de scènes de vie. Mais son œuvre reflète aussi ses multiples voyages, en France et à l’étranger.

Ravies de cette déambulation dans ce musée, nous avons fait une sympathique pause déjeuner avant de repartir dans les locaux du Haras National pour découvrir un imposant patrimoine bâti entouré de verdure. Depuis 2016 sous la houlette d’un Syndicat mixte ses missions sont triples. La 1ère est d’assurer la traçabilité sanitaire des équidés sur son territoire. La seconde : d’appuyer le développement de la filière équine sur le territoire et la 3ème, et non des moindres, consiste à faire rayonner le patrimoine équestre matériel et immatériel (savoir-faire) hérité des Haras nationaux et du Cadre Noir. De nombreuses voitures hippomobiles en parfait état y sont visibles. Les harnachements indispensables à l’attelage sont présentés dans une magnifique sellerie d’honneur. L’importance de la collection est équivalente à la place que tiennent « le Postier » et « le Trait » bretons dans un Haras à l’origine du cheval d’attelage par excellence.
Ce qu’il faut retenir :

Fils d'un artisan lamballais, Mathurin Méheut manifeste très tôt des dons artistiques et sort à 20 ans, brillamment diplômé de l'école des Beaux Arts de Rennes.
En 1913 il publie un livre sur la faune et la flore de la station de Roscoff qui le fait accéder à la notoriété
Une année plus tard, il part au Japon avec la bourse « Autour du monde » financée par la fondation Albert Kahn. Au Japon, il trouve la confirmation de ses choix iconographiques comme la représentation de l'essentiel avec un minimum de moyens.
Mobilisation générale : il rentre en France comme simple fantassin puis en 1917 il devient attaché au service topographique de l'état-major de la 1re armée comme lieutenant. Peintre combattant sur le front d'Artois et en Argonne, il dessine la vie quotidienne de ses pairs.

Démobilisé en 1919, il prépare pendant deux ans sa 2ème exposition au musée des Arts décoratifs à Paris où se mêlent ses anciennes tendances et d'autres qui annoncent, tant par le graphisme que leur thématique, le Méheut des années trente et quarante. Pendant l'entre-deux-guerres, Méheut est au sommet de sa carrière. Il est connu aussi bien comme décorateur, illustrateur et céramiste.
Dès l'après-guerre, débute une collaboration de plus de trente ans avec les faïenceries Henriot à Quimper, mais aussi avec la Manufacture de Sèvres et Villeroy & Boch. Les grandes compagnies maritimes confient à Méheut la décoration de leur plus beaux paquebots, ambassadeurs de tout un art de vivre. Et enfin, les éditeurs continuent à faire appel à lui comme révélateur de la Bretagne à Paris.
Il a aussi l'occasion d'enseigner dans plusieurs écoles prestigieuses : l'école Boulle et l'école Estienne. Après une interruption de quelques années pour se consacrer à sa carrière, il a de nouveau l'occasion d'enseigner, pendant la seconde guerre mondiale, de 1941 à 1943, cette fois à Rennes, à l'école des Beaux-Arts où il fut élève. De ces dernières années d'enseignement, un élève marqué par son professeur fera une carrière internationale dans le cinéma d'animation : Frédéric Back.

Ravies de cette déambulation dans ce musée, nous avons fait une sympathique pause déjeuner avant de repartir dans les locaux du Haras National pour découvrir un imposant patrimoine bâti entouré de verdure. Depuis 2016 sous la houlette d’un Syndicat mixte ses missions sont triples. La 1ère est d’assurer la traçabilité sanitaire des équidés sur son territoire. La seconde : d’appuyer le développement de la filière équine sur le territoire et la 3ème, et non des moindres, consiste à faire rayonner le patrimoine équestre matériel et immatériel (savoir-faire) hérité des Haras nationaux et du Cadre Noir. De nombreuses voitures hippomobiles en parfait état y sont visibles. Les harnachements indispensables à l’attelage sont présentés dans une magnifique sellerie d’honneur. L’importance de la collection est équivalente à la place que tiennent « le Postier » et « le Trait » bretons dans un Haras à l’origine du cheval d’attelage par excellence.


- Ce qu’il faut retenir :
- 1665 : Colbert crée une administration des haras pour limiter l’importation de chevaux de guerre avec dépôts d’étalons
- 1806 :Napoléon rétabli par décret impérial les Haras qui avaient été dissous par l'assemblée constituante en1790.
- 1825 : création du Haras de Lamballe et d’une école d’officiers
- 1870 : après la défaite de la guerre de Prusse, Lamballe est choisie pour reconstruire le cheptel national.
- 1903-1907 : l’agencement du Haras a suivi le développement de l’élevage équin en Bretagne.12 écuries vont être construites sur le site pouvant accueillir au total environ 400 étalons!
- 2006 : création du Syndicat Mixte du Haras national de Lamballe composé des 4 collectivités
- 2014 : dernière saison de reproduction pour l'IFCE (Institut Français du Cheval et de l’Equitation) qui gérait l’élevage, les étalons nationaux et la filière sport depuis 2010.
- 2015 : Création du Groupement d’Intérêt Public Cheval Breton pour préserver la race. Le GIP Cheval Breton exerce les missions d'étalonnage et de testage, la diffusion de la semence, et les constats de gestation pour la race bretonne.
- 2016 : Rachat du Haras national de Lamballe par le Syndicat Mixte. Ce dernier est gestionnaire et propriétaire des lieux
Marie-France Delahaye
AQUARIUM DE TREGASTEL ET LIGUE DE PROTECTION DES OISEAUX
AQUARIUM DE TREGASTEL ET LIGUE DE PROTECTION DES OISEAUX

La faune des Côtes d’Armor a été au centre d’une journée découverte afin de cerner la richesse de notre littoral : la diversité de nos poissons et crustacés rivalisant avec celles de nos oiseaux de mer et de rivage.
Aménagé sous un gigantesque amas granitique, formé il y a 300 millions d’années, l’Aquarium de Trégastel dévoile les secrets des fonds sous-marins du littoral breton. Un guide des lieux et Michel Hignette, directeur honoraire de l’aquarium de la Porte Dorée à Paris, ont émaillés ce circuit de visite de leurs remarquables connaissances pour mieux nous immerger dans la Zone des Embruns, au-dessus du niveau des plus hautes eaux, dans la Zone des Marées, balayée par le flux et le reflux des eaux, et enfin dans la Zone des Profondeurs, réservée aux gros poissons.


Cette matinée de « plongée » observer la faune des eaux costarmoricaines : homards, bars, dorades grises, grondins, lieux, églefins, langoustines, encornets, ormeaux, congres, raies, roussettes, et même hippocampes… Cette longue énumération parle d’elle-même !
Après un agréable déjeuner dans une brasserie de bord de mer, nous avons pris la direction de l’Ile Grande, un autre beau site du département, pour passer le seuil de la Station de la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) qui dispose d'une surface d'exposition permanente de 250 m2 avec notamment, une falaise artificielle de 5 mètres de hauteur abritant 110 maquettes d'oiseaux, et une salle entièrement dédiée au monde sous-marin. Ce site fait le pari de délivrer une vision globale de la biodiversité et de la gestion de l'archipel. Pari réussi puisque nous savons désormais mieux reconnaître certaines sortes de goélands, de mouettes ou de sternes !

La Station confirme ainsi sa fonction de vitrine de la réserve naturelle des Sept-Îles. Grâce à une caméra installée sur l’Ile Rouzic, nous avons observé en direct la plus importante colonie métropolitaine de fous de Bassan, forte de 25.000 couples. La mise sous protection des 7 îles, et de l'estran qui les entoure, attire aussi d'autres espèces telles que le petit pingouin, le guillemot de Troïl, le cormoran huppé... Rappelons qu’au début du XXe siècle, les nombreux oiseaux peuplant l'archipel des Sept-Iles étaient décimés par les tirs effectués, tel un loisir, par les passagers des bateaux … et que la création de la LPO en 1912 a mis fin au massacre des macareux moines

La LPO a également d’autres missions comme les soins apportés à la faune sauvage en détresse, notamment les oiseaux blessés ou mazoutés accueillis au centre de soins de la station LPO (non visitable) et l’information et la sensibilisation du public et des scolaires à travers des expositions, des excursions commentées aux Sept-Îles et des sorties nature : oiseaux, plantes du littoral, sorties à marée basse... La station LPO de l’Île-Grande a été labellisée « Maison Nature » par le Conseil Départemental.
Pour couronner le tout une météo sans nuage a parachevé cette belle journée riche en découverte !
Marie-France Delahaye
VISITE GUIDEE DU CHATEAU de NANTES et la TRAITE NEGRIERE
VISITE GUIDEE DU CHATEAU de NANTES et la TRAITE NEGRIERE
Erigé au Moyen Age par le Duc François II et terminé par sa fille Anne de Bretagne, seule femme à avoir été deux fois reine de France, le château livre ses secrets. Puis une exposition « l’Abîme » a révélé le destin de celles et ceux qui furent victimes du système colonial.
C’est par un temps plus que radieux que nous nous sommes retrouvées à NANTES pour découvrir ou redécouvrir cette belle ville .
Le rendez-vous était fixé dans une crêperie face au château des Ducs de Bretagne. Nos lycéennes de Bretagne Nord y ont été rejointes par les lycéennes de Limoges et de Bordeaux. Très agréable moment de convivialité qui ne sera pas le seul. Nous étions une quinzaine environ.
Ensuite, nous avons visité le château des Ducs de Bretagne, visite très documentée par une jeune guide.

L’histoire commence en 1207, lorsque Guy de Thouars construit le premier château au pied de l’enceinte gallo-romaine de Nantes. Ce dernier avait pour but d’affirmer le pouvoir des Ducs face à celui des évêques de Nantes. Une centaine d’années après, François II trouva que ce château n’était pas à la hauteur d’une ville comme Nantes. Il construit alors un nouvel édifice à double vocation : être résidence ducale et forteresse militaire pour résister au pouvoir royal.

La Duchesse Anne, fille de François II est contrainte d’épouser deux rois successifs : Charles VIII et Louis XII. Ces mariages entraînent l’union en 1532 de la Bretagne à la France, définitivement scellée par l’édit signé au château en 1532 par François 1er. Dès lors, le château perd son statut de résidence ducale pour devenir une forteresse royale.
Au XIXème siècle, le château conserve sa fonction militaire.
En 1915, il devient la propriété de Nantes.
En 1924, il devient un musée de l’histoire de Nantes, rénové de 1990 à 2007,.
Le grand logis est l’édifice le plus important, de style gothique flamboyant. On y rentre par un escalier à vis, à double révolution. Le premier étage servait à la gouvernance, l’étage au-dessus était la résidence du Duc.
Cette visite terminée, nous avons continué par la découverte du cœur de la ville de Nantes : la place Royale, la basilique Saint Nicolas, la place Graslin avec son théâtre et la célèbre brasserie « La Cigale » de style Art Nouveau. Elle est l’œuvre d’Emile Libaudière, classée monument historique en 1964, puis le passage Pommeraye, galerie marchande construite en 1840 par les architectes J.B. Buron et Hyppolyte Durand-Graslin.

La soirée s’est terminée dans un restaurant du centre ville où nous avons dégusté le poisson de la Loire « le sandre au beurre blanc » dans une très bonne ambiance.
Le lendemain matin, rendez-vous au pied du Château pour une visite guidée des quartiers de négoce au temps de l’esclavage. Sur le passé négrier de Nantes du XVIII au XIXème siècle.
Visite du quai d’où partaient les navires vers les Antilles et l’Afrique.
Visite des lieux symboliques comme la passerelle Schoelcher et le mémorial est tapissé de 2000 plaques de verre où sont inscrits les noms des bateaux qui ont participé à ce commerce triangulaire.

Nous avons longé les quais et admiré les belles maisons typiques des armateurs. Ces belles et vastes demeures des riches familles d’armateurs sont construites sur un sol sablonneux. Elles sont faites en tuffeau et sont parées de mascarons (visage, masques fantastiques ou grotesques, visage de femme couronné d’épis de blé, Bacchus coiffé de raisins). Elles sont dotées de balcons en fer forgé. Ces résidences illustrent, par leur faste, la dimension du passé commercial de la ville de Nantes.
Nantes à elle seule représentait 40 % du commerce triangulaire en France.
Cette balade s’est terminée sur « l’ile aux machines » où nous avons admiré le grand éléphant de 12 mètres de haut, large de 8 m. Jules Verne avait imaginé un éléphant mécanique au début du XXème siècle (Jules Verne est né à Nantes et y a passé toute sa jeunesse). La Loire, ses îles, le port, les bateaux, l’agitation des quais, tous ces éléments sont la source du rêve et le creuset de son œuvre.
C’est à nouveau dans un restaurant près du Château que nous avons déjeuné (repas typique nantais). Ensuite nous enchaînons par la visite de l’exposition l’Abime, Nantes dans la traite atlantique et l’esclavage colonial 1707-1830. Visite guidée retrouvant notre guide de la veille, qui nous a fait un exposé clair sur le fonctionnement du commerce triangulaire.
Les esclaves étaient achetés en Afrique et vendus aux Antilles à des propriétaires de plantations. Là-bas, les esclaves doivent travailler dans les champs de canne à sucre, de tabac ou réaliser des tâches domestiques.
Les bateaux partaient de Nantes avec des armes, du sel, des ustensiles, des pacotilles (autrefois : petit lot de marchandises empaquetées qui servaient de troc avec les chefs africains).. Ils étaient ensuite emmenés dans des bateaux pour être vendus dans les colonies. Ils travaillaient dans des plantations de produits exotiques comme le cacao, le coton, le sucre, le café. Avec l’argent de la vente des esclaves, les armateurs achetaient ces produits et les importaient en Europe en faisant des bénéfices considérables.
Les noirs vendus et déportés sont soumis au « code noir » élaboré par Colbert .Schoelcher a lutté pour l’abolition de l’esclavage (1842).
Après un rafraîchissement, nous nous sommes quittées très heureuses de ces belles découvertes. Un bon moment de Culture et de Rencontres.
Christiane ANDRE et Josette SALMON

ROSA BONHEUR : LA LIBERTE DE PEINDRE
ROSA BONHEUR : LA LIBERTE DE PEINDRE
Peintre et sculptrice, spécialisée dans la représentation animalière, Rosalie Bonheur connaît de son vivant la gloire qui faiblira après sa mort. Son travail et toute son existence témoignent de sa reconnaissance des animaux dans leur singularité.

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Née en 1822 à Bordeaux dans une famille d’artistes, « Rosalie » commence à crayonner dès l’âge de 4 ans. Si elle vit une enfance heureuse entre Bordeaux et le château Grimont à Quinsac, où elle fait de longs séjours, cette période ne va pas durer longtemps. Les aléas financiers de son père et la mort de sa mère, alors qu’elle n’a que 11 ans, vont très tôt orienter sa destinée. En effet, dès l’âge de 13 ans elle décide de se livrer à l'art.
D’année en année elle ne cessera de progresser, soutenue par son père (les cours de peinture sont interdits aux filles de cette époque !) et à 19 ans elle exposera au Salon de Paris. Puisant son inspiration des scènes des champs et de la vie rurale, elle étudie les animaux qui deviendront sa spécialité, tant en peinture qu'en sculpture. Elle devient la 1ère femme peintre animalière sous le nom de Rosa Bonheur et les commandes vont affluer. Au salon de 1948 elle reçoit une médaille de 1ère classe (or) pour ses bœufs auvergnats, ce qui lui permet d’obtenir une commande de l'État pour réaliser un tableau agraire Le Labourage nivernais, pour une somme de 3 000 francs.
Elle accède alors à la célébrité ! Cette oeuvre de grande dimension sera suivie par Le marché aux chevaux de 5m sur 3, après un an et demi d’observation de l’anatomie des chevaux sur le marché de Paris. Exposée au Salon de 1853 ce tableau,accueilli avec enthousiasme par la critique, est admiré aussi bien en France qu’en Angleterre ou aux Etats-Unis. Le jury explique pourquoi ce tableau n’obtient aucune récompense : « Par décision spéciale, Melle Rosa Bonheur ayant obtenu toutes les médailles qu’on peut accorder aux artistes, jouira à l’avenir des prérogatives auxquelles son talent éminent lui donne droit. Ses ouvrages seront exposés sans être soumis à l’examen du jury ».C’est là qu’elle rencontre le marchand Ernest Gambart qui la fait connaître à l’étranger.

Aussitôt elle connaît une gloire internationale. Elle est la 1ère artiste dans l'histoire de la peinture dont le marché spécule de son vivant sur ses tableaux qui atteignent des cotes vertigineuses. Ses revenus lui permettent d’être soutien de famille depuis la mort de son père mais aussi d’acquérir son indépendance financière : elle achète le château de By à Thomery en Seine et Marne, près de la forêt de Fontainebleau, où elle s’entourera d’animaux… De nombreuses personnalités lui rendent visite comme en 1865l'impératrice Eugénie pour la nommer au grade de chevalier de la Légion d’Honneur : « Vous voilà chevalier, je suis heureuse d'être la marraine de la première femme artiste qui reçoive cette haute distinction ». A partir de 1871 elle se tourne vers la peinture de fauves qu’elle étudie au Jardin des Plantes. Elle acquiert un couple de lions et travaille chez elle, d’après modèle. Pour elle, les animaux ont une âme, comme les humains : « Je trouve monstrueux qu’il soit dit que les animaux n’ont pas d’âme. Ma lionne aimait, donc elle avait une âme plus que certaines gens qui n’aiment pas ».

Plus tard, elle recevra à By une surprenante personnalité : Buffalo Bill qui est à Paris avec son spectacle de cow-boys. Il la reçoit dans son cirque et lui fait cadeau d'un superbe costume sioux, d'un arc et de flèches, qu'elle accepte volontiers. Pour le remercier elle réalisera son portrait.
Côté vie privée Rosa Bonheur malgré toutes ses excentricités et ses idées à contre-courant, sa vie personnelle, peu conventionnelle, n’a pas fait scandale, à une époque très soucieuse des conventions. Elle a vécu 52 ans avec Nathalie Micas puis avec Anna Elizabeth Klumpke, une artiste peintre américaine qui l’accompagnera jusqu’à sa mort. Portant cheveux courts et pantalon, fumant des havanes, Rosa Bonheur est la plus célèbre des femmes qui se consacraient au 19ème siècle à la peinture animalière. 2.100 œuvres (tableaux, aquarelles, bronzes et gravures) de son atelier et sa collection particulière sont vendus à la galerie Georges Petit à Paris.

Ernest Gambart fera ériger un monument à la mémoire de Rosa Bonheur à Fontainebleau, en face du château. 2 plaques de bronze représentent Le marché aux chevaux et Le labourage nivernais ainsi qu’un portrait de l’artiste réalisé par son frère Isidore. L’ensemble, surmonté d’une réplique de la sculpture Le Taureau est encore visible aujourd’hui.
Personnage important pour l'évolution du rôle de la femme dans le milieu artistique, elle ne soutient pas explicitement les mouvements féministes naissants et n'adhère pas aux mouvements pour les droits de la femme qui se multiplient alors en France.
À partir de 1980, des biographes l'associent aux débuts du féminisme, notamment aux Etats Unis, en raison de la vie très libre qu'elle a menée.
Marie France DELAHAYE