Par Garance SouliéAgrégée d’allemand, enseignante en classes préparatoires

ANGELA MERKEL

Angela Merkel a un parcours hors du commun, non seulement parce qu’elle est la seule femme à avoir occupé le poste de Chancelière mais aussi par sa longévité au pouvoir, 4 mandats successifs de 4 ans de 2005 à 2021 et une côte de popularité qui atteint 70% d’opinion favorable à son départ.

Ses vies personnelle et politique sont en miroir du destin de l’Allemagne. Quel bilan peut-on dresser de son action et quelle image présente-t-elle en Allemagne et à l’étranger.

La jeunesse d’Angela Merkel

 Vie personnelle :

Elle est née Angela Kasner à Hambourg le 17 juillet 1954, fille d’un père pasteur luthérien et d’une mère institutrice. Elle passe son enfance à Templin dans le Brandebourg en Allemagne de l’est où son père prend la direction d’un séminaire qui deviendra un centre de formation et où seront accueillis des handicapés. Elle grandit dans ce contexte de l’attention à autrui. Comme la plupart des élèves de RDA, elle participe au mouvement de la jeunesse communiste ce qui est pratiquement un passage obligatoire. Très brillante, elle entreprend des études de physique à l’université de Leipzig jusqu’en 1978. Elle parle anglais et russe couramment et connaît parfaitement la culture russe.

Après ses études, elle part pour Berlin, travaille à l’académie des sciences et prépare une thèse de doctorat en chimie quantique qu’elle soutient en 1986.

Vie politique :

En 1989, c’est la chute du mur de Berlin. Différents mouvements se créent dont “le renouveau démocratique”. Après la réunification de l’Allemagne en octobre 1990, le renouveau démocratique se fond dans la CDU et Angela Merkel est élue dans une circonscription de l’est de l’Allemagne. Sous la chancellerie d’Helmut Kohl, elle devient successivement ministre des Femmes et de la Jeunesse (1991-1994), puis de l’Environnement, de la Protection de la nature et de la Sécurité nucléaire (1994-1998). En 2000, elle est élue Présidente de la CDU, suite au scandale des caisses noires dans lequel Helmut Kohl est impliqué.

En 2005 elle est élue Chancelière, avec le soutien d’une coalition entre les conservateurs et les sociaux-démocrates.  Elle devient la 1ère Chancelière d’Allemagne, la plus jeune et la 1ère originaire de l’Allemagne de l’est. Quatre mandats vont suivre.

Bilan

Les faits marquants

En 2007, elle fait changer d’avis Georges Bush sur la question du réchauffement climatique,

En 2008, la crise financière de l’euro conduit à un renforcement de la coopération européenne notamment entre la France et l’Allemagne, la création d’un frein à l’endettement et le renforcement du pacte de stabilité, 

En 2011, suite à la catastrophe de Fukushima, elle décide la sortie de l’Allemagne du nucléaire,

En 2015, devant l’afflux massif des réfugiés syriens, sa politique migratoire est vivement critiquée.

En 2017, elle doit faire face à un refus de coalition entre les conservateurs et les sociaux-démocrates et se retrouve dans l’impasse pour former son gouvernement.

En 2020, elle gère la crise sanitaire, en scientifique. L’Allemagne connaît moins de morts que la France pour une population supérieure,

En 2021, les sociaux-démocrates gagnent de peu les élections et Angela Merkel décide de ne pas briguer un nouveau mandat.

Son image :

Surnommée “Mutter” pour son côté apaisant, Angela Merkel tranche avec les personnalités politiques qui la précèdent. Elle s’inspire des valeurs du protestantisme notamment le travail, l’humilité, la simplicité, l’attention aux autres. Elle a aussi grandi à l’est et en connaît les codes, d’où son goût du secret et de la retenue. C’est une scientifique pragmatique, elle recherche des solutions concrètes et ne reste pas campée sur des idéologies. C’est aussi une habile tacticienne, elle a le sens du compromis, de par sa vision personnelle mais aussi du fait du système politique allemand qui ne peut fonctionner que par des accords de coalitions.

En Allemagne

Angela Merkel a transformé le paysage politique de la droite vers le centre et a repris un grand nombre de mesures de ses partenaires de coalition (la sortie du nucléaire, la fin du service militaire obligatoire, l’introduction du smic,).

En 2005, l’Allemagne connaissait une situation de récession due à la réunification. Sous l’ère Merkel, elle est devenue la première puissance économique en Europe et la 4ème mondiale grâce à la force de son industrie. Mais elle souffre d’une faiblesse de ses infrastructures due à un manque d’investissement et accuse un retard important dans le numérique.

Une partie de l’opinion publique lui a reproché une politique d’attentisme et à court terme, son austérité dans la crise grecque, sa politique féministe trop tardive, la montée des extrémismes et un bilan climatique en demi-teinte. L’éolien atteint ses limites et l’Allemagne reste très dépendante du gaz russe.

A l’étranger.

La situation de l’Allemagne sur la scène internationale s’est normalisée après la chute du mur.  Elle est engagée sur de nombreux fronts aux côtés de l’OTAN.

En Europe, Angela Merkel a géré la crise financière de manière à maintenir la Grèce dans la zone euro,

Aux USA, proche de Barack Obama, elle s’est opposée à Donald Trump.

En Russie, elle connaît bien la Russie, mais Poutine rejette le multilatéralisme et reste dans le rapport de force. Les relations sont complexes,

Avec la Chine, de plus en plus importante sur le plan commercial, c’est le 2eme client de l’Allemagne. Angela Merkel soigne ses relations avec la Chine sans renoncer à évoquer les droits de l’homme et la situation des Ouïghours. 

 Pendant ses 16 années de pouvoir, Angela Merkel aura été une des femmes les plus influentes du monde et un leader sur la scène internationale.

Christine O’Mahony